Culture et mémoire républicaine

 

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28 juillet 2007 6 28 /07 /juillet /2007 22:21

Les 27, 28 et 29 juillet 1830, Paris connaît trois journées d'insurrection populaire (que les auteurs romantiques qualifieront de « Trois Glorieuses ») au terme desquelles Charles X est contraint de laisser le trône à son cousin, le duc d'Orléans, futur Louis-Philippe Ier. Cette révolution républicaine confisquée par les libéraux monarchistes signe toutefois l'échec d'un retour à l'Ancien Régime.

Tout commence le 26 juillet 1830 lorsque le « Moniteur », le journal officiel du gouvernement français d'alors, publie quatre ordonnances du roi Charles X qui sont autant de coups de forces à l'encontre de l'agitation parlementaire. En effet, depuis plus d'un an, le torchon brûle entre le roi, désireux d'en revenir à une monarchie d'avant 1789, et la Chambre des députés, où l'opposition libérale est grandissante.

Le 18 mars précédent, le roi avait décidé de dissoudre cette Chambre indélicate. Pourtant, contre toute attente, les nouvelles élections portent à 274 le nombre d'opposants, contre 221 précédemment.

Affaibli sérieusement par ces élections, considérant abusivement que le royaume est en péril, et qu'il en va de la sûreté de l'Etat, le roi publie quatre ordonnances « scélérates » visant à rétablir, par la force, son autorité.

La première ordonnance suspend la liberté de la presse par le rétablissement de l'autorisation préalable à toute publication. La deuxième dissout la Chambre qui vient à peine d'être élue. La troisième écarte la patente du calcul du cens électoral, de sorte à réduire encore un peu plus le corps électoral et à retirer le droit de vote à la bourgeoisie, majoritairement libérale. Enfin, la quatrième fixe les nouvelles élections pour les 6 et 18 septembre.


La nouvelle met en émoi la bourgeoisie et l'ensemble du petit peuple parisien. Et dans les bureaux du « National », le journaliste Adolphe Thiers rédige aussitôt une protestation solennelle, signée par 44 journalistes, et publiée le lendemain par « Le National », « Le Temps », « Le Globe » et « Le Journal du commerce », qui paraissent tous sans autorisation.

Aussitôt, le préfet de police, Claude Mangin, ordonne la saisie des presses des quatre journaux en cause et le parquet lance des mandats d’arrêt contre les signataires de la protestation. De vives échauffourées ont alors lieu entre la police et les ouvriers typographes, qui redoutent de perdre leur emploi.



 

Ces échauffourées actent du début des émeutes. La foule parisienne, des ouvriers aux commerçants en passant par les étudiants, exaspérée par la situation politique et exaltée par la fougue de quelques activistes républicains, tel François-Vincent Raspail, Louis-Adolphe Robin-Morhéry ou encore Armand Marrast, se soulève.

Les mouvements de foule du 27 vont dès le lendemain s'embraser en révolution républicaine. Le peuple parisien se soulève, s'arme et dresse des barricades par milliers dans les rues et affronte les forces armées commandées par le très détesté maréchal Marmont au cours de combats sanglants. Les soldats perdront 200 hommes, les insurgés un millier.

Le 29 juillet, le dispositif militaire de Paris fini toutefois par céder. Les insurgés sont maîtres de Paris. Charles X et la famille royale sont contraints à fuir Paris.

Les députés libéraux, majoritairement monarchistes, vont alors récupérer le bénéfice de la révolution populaire aux dépens des républicains, désorganisés. Au terme de « l'hésitation de 1830 », jouant sur la peur, ces députés libéraux, tel Laffitte, soutenu par le vieux Talleyrand et le jeune Thiers, vont finalement réussir à conserver la monarchie constitutionnelle, au prix d'un changement de dynastie. C'est la « révolution confisquée ».

Cette monarchie dite « de Juillet » veut toutefois bien rompre avec le passé. Cette rupture se veut tout d'abord symbolique : elle prend ainsi comme emblème le drapeau tricolore bleu-blanc-rouge. Rompant avec le « parti prêtre », le nouveau régime s’affirme beaucoup plus laïc et plus libéral que son prédécesseur. Mais la Charte de 1814  n’est que superficiellement toilettée, et le droit de vote n’est que peu étendu par la loi électorale du 19 avril 1831.

Les activistes républicains, peu nombreux, mais déterminés, et profondément déçus par les premiers pas de la monarchie bourgeoise, harcèleront sans cesse le régime. Des émeutes, parfois armées, toujours rapidement réprimées, vont secouer sporadiquement le pays, de 1831 à 1839. Ainsi, par exemple, les émeutes déclenchées les 5, 6 et 7 juin 1832, à l’occasion des obsèques du général Lamarque, député républicain, feront 800 morts. Ces émeutes seront d'ailleurs immortalisées par Les Misérables de Victor Hugo où le jeune Gavroche meurt sur les barricades.

Les initiateurs de la monarchie de Juillet croyaient marcher dans les pas de la «Glorieuse Révolution» qui avait permis aux Anglais, en 1688, par le changement de monarque, d'installer une monarchie parlementaire durable et résistante à toute poussée de fièvre révolutionnaire. Ils n'aboutiront en fait qu'à un répit de 18 ans avant une nouvelle révolution qui mit cette fois définitivement fin à la royauté en France…

 

 
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28 mai 2007 1 28 /05 /mai /2007 22:54

Lors de la
"Semaine Sanglante", qui se déroula 21 au 28 mai 1871, le mouvement insurrectionnel de la Commune de Paris est écrasé par les troupes versaillaises, après des combats acharnés sur des centaines de barricades et une répression féroce.

Dès la signature du traité de paix avec l'Allemagne, le 10 mai, Adolphe Thiers, l'homme fort de la République "réaliste", obtient de l'occupant prussien la libération anticipée de 60 000 soldats. Il décide aussitôt de lancer contre la capitale 130 000 hommes, dont des anciens prisonniers et beaucoup de campagnards recrutés et formés à la hâte.

Le dimanche 21 mai, les troupes gouvernementales entrent dans Paris par la porte de Saint-Cloud. Pendant une semaine, les combattants de la Commune, déterminés, vont lutter quartier par quartier, maison par maison, barricade par barricade. Les combats sont sanglants. Ils feront au total 4000 tués côté communards et 877 du côté des troupes versaillaises.

Mais l'armée pratique en même temps ce que Louise Michel a nommé la "curée froide". On a ainsi prévu des cours prévôtales chargé de juger sommairement les insurgés pris les armes à la main, et de les fusiller sur place. Une vingtaine fonctionne dès le 23 mai. C'est à Montmartre, dans toutes les rues, qu'on commença à tuer systématiquement. Puis se mirent en place les "abattoirs", où l'on fusillait à la chaîne au moindre soupçon : au Luxembourg, au Châtelet, caserne Lobau, à l'Ecole militaire, aux prisons Mazas et de la Roquette, au parc Monceau, aux gares. Les exécutions se faisaient parfois à la mitrailleuse. Elles durèrent toute la semaine, et plusieurs jours encore après le 28 mai.

Le 26 mai, la résistance est à son comble, tandis que les exécutions sommaires par les versaillais se multiplient à mesure qu’ils avancent dans Paris. Le 27 mai, c’est le massacre des fédérés au milieu des tombes du Père-Lachaise : cent quarante-sept fédérés, combattants de la Commune furent fusillés et jetés dans une fosse ouverte au pied du mur.. Cependant, le 28, Ferré, Varlin, Gambon se battent encore au cœur du Paris populaire, entre la rue du Faubourg-du-Temple et le boulevard de Belleville. À une heure, la dernière barricade tombe. Le lendemain, le fort de Vincennes capitule et ses neuf officiers sont fusillés sur-le-champ.

Les Communards se vengent en faisant fusiller environ 480 otages, dont l'archevêque Darboy. Ils n'hésitent pas non plus à mettre le feu à Paris. Ils incendient les monuments les plus illustres tels que le palais des Tuileries, le palais de Justice gothique, l'Hôtel de Ville hérité de la Renaissance, le Palais-Royal et le palais d'Orsay...

On ne saura jamais le nombre exact des victimes que fit la Semaine Sanglante : au minimum 15 000, probablement 20 000, voire davantage. A cela s'ajoute la gigantesque rafle organisé dans le Paris populaire : 43 522 arrestations sont ainsi, officiellement, dénombrés. 20 000 furent détenus pendant plusieurs mois dans des conditions inhumaines, sur des pontons dans les ports de Brest, Cherbourg, Rochefort et Lorient. Un millier de prisonniers y trouvèrent la mort.  Quelques-uns seulement, trop évidemment innocents, furent relâchés. Il resta à juger 34 952 hommes, 819 femmes et 538 enfants dont un quart n'avait pas 15 ans…

Vint alors le procès des communards. On constitua pour juger ces insurgés, bien souvent des miséreux, vingt-quatre conseils de guerre qui rendirent 50 000 décisions. On jugeait et on condamnait encore à mort en 1877. Pour les hommes, furent prononcées 87 condamnations à mort (26 seulement furent exécutées), 231 condamnations aux travaux forcés à perpétuité ou à temps, 1157 condamnations à la déportation en enceinte fortifiés, 3400 à la déportation simple. Le reste du pauvre troupeau l'était à des peines diverses de prison. On condamna 130 femmes (dont 8 à la peine de mort, commuée), 19 aux travaux forcés, 28 à la déportation. 55 enfants étaient envoyés en maison de correction, cinq condamnés à la prison, un à la déportation simple.

Les peines les plus lourdes se purgaient en Nouvelle-Calédonie : à l'île Nou pour les travaux forcés ; à la presqu'île Ducos pour les "blindés" de la déportation en enceinte fortifiée ; à l'île des Pins pour la déportation simple. Au 1er janvier 1876, on comptait 2983 déportés simples, dont 13 femmes, 879 déportés en enceinte fortifiée, dont 6 femmes, et quelques trois cent bagnards, dont trois femmes.

L'amnistie complète ne fut accordée que le 11 juillet 1880. Elle libéra 541 hommes et 9 femmes, dont Louise Michel...


D'après les travaux de Jacques Rougerie
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